| “ Je passai une rue puis une autre, grelottant, lorsque tout à coup je sentis — non, je ne la sentis point : elle me croisa, impétueuse : la Parole. Cette rencontre inattendue me paralysa un moment — assez pour lui donner le temps de retourner à la nuit. Remis, je réussis quand même à la saisir par sa chevelure flottante. Et je tirai désespérément ces fibres qui s'allongeaient à l'infini, fils télégraphiques qui s'éloignaient avec le paysage entrevu, note qui monte, s'amenuise, s'étire, s'étire... Et je me retrouvai seul au milieu de la rue, une plume rouge dans mes mains violacées.” Source: Liberté sur parole (1958), Octavio Paz (trad. Jean-Clarence Lambert), éd. Gallimard, coll. Poésie, 1966 (ISBN 2-07-031789-7), partie II. AIGLE OU SOLEIL ? (1949-1950), Travaux du poète III, p. 48 - Liberté sur parole, 1929 |